Parents pour la vie
17 nov
« La bataille de Charles et Julie en mémoire de leur petit Léo ».
Jamais, au grand jamais, je n’aurais imaginé lire le drame de ma vie dans les médias. Nous sommes plutôt discrets et réservés et faisons partie de ces personnes qui sont pudiques de leur vie. On n’est pas du genre à se mettre en avant. Parfois je regrette de ne pas avoir crié au monde entier que Léo était né, que c’était le plus beau bébé et qu’on était les plus heureux du monde. Je pense toujours aux gens, qui eux ne sont pas heureux, et je n’ai pas envie d’être celle qui la ramène.
Alors effectivement, le jour où le premier article, sur Léo et notre histoire, est sorti, on n’en menait pas large. D’abord car ça nous a glacé le sang de voir écrit noir sur blanc tous les détails du décès de notre fils, ensuite car cela rend le drame réel et nous reclaque la figure et enfin parce que ça fait autant de bien que de mal. C’est compliqué à gérer.
Mais nous irons jusqu’au bout.
Lorsque Léo s’est endormi pour toujours, le 26 mars dernier, notre mot d’ordre a été de continuer à vivre, pour lui et de faire en sorte que cela ne se reproduise plus, pour tous les autres. Jamais, nous ne pourrions accepter de voir ou de savoir des parents endeuillés dans de telles circonstances. En clair, ne plus jamais voir un bébé s’envoler alors que cela aurait pu être évité. Parce qu’elle repose bien là notre intense colère qui s’est vite ajoutée à notre deuil et à notre sidération totale. Ce n’était pas une fatalité. Ce n’était pas écrit. Découvrir après la mort de son enfant, que cela n’aurait pas dû arriver, que la personne en charge de sa sécurité, et ses responsables, n’étaient pas dignes de confiance et que cela avait été souligné à plusieurs reprises : c’est un drame dans le drame. C’est une mise en abîme tragique. C’est frapper des parents déjà à terre. C’est enfoncer plusieurs couteaux dans une plaie déjà béante.
J’explique souvent à Léo, dans ma tête, pourquoi Papa et Maman et les gens qui nous entourent, font autant de bruit pour lui. De nature si calme et posé, il ne doit pas toujours comprendre car cela ne nous ressemble pas. Mais je lui explique que grâce à lui on va faire bouger les choses, on va transmettre son message au plus grand nombre et on va demander aux responsables de se remettre en question. Dans tous métiers qui puissent exister, nous avons des responsabilités, des droits mais aussi des devoirs. Nous sommes payés pour cela. Nous signons un contrat, nous avons des comptes à rendre. Nous sommes surveillés, suivis, audités. D’autant plus quand nous faisons le choix d’être responsable de vies humaines et d’autant plus quand il s’agit de petites vies fragiles. Pilotes d’avions, chirurgiens, assistantes maternelles ect… Un métier on le choisit par passion et non par dépit. C’est une vocation et non une voie de secours.
C’est comme cela que doivent se passer les choses. Malheureusement, sans le savoir, ce n’était pas notre cas. Si nous avions su, à quel point tout ce qui entourait la garde de Léo dysfonctionnait autant, jamais, jamais, ja-mais nous l’aurions confié à cette personne, à ces services. Même en sachant un dixième de cela, nous n’aurions jamais confié ce que l’on a de plus cher au monde. Confier son enfant, ce n’est pas confier une plante. On confie notre chair, notre sang, notre plus beau trésor, notre avenir. Quand on a le moindre doute sur nos capacités ou sur celles des personnes que l’on encadre, on doit agir. Personnellement et professionnellement, c’est ce que je fais au quotidien.
« Cela aurait pu arriver à n’importe qui ». Je ne suis pas d’accord. J’ai toujours été paniquée par la mort inattendue du nourrisson. J’ai très tôt eu cette prise de conscience. Déjà quand je faisais du babysitting, quand j’étais jeune adolescente, je collais toujours mon oreille pour entendre le bébé respirer. Je surveillais que rien ne pouvait le gêner, lui bloquer la respiration. Pourtant je n’étais pas autant renseignée qu’à présent mais pour moi certaines règles de sécurité étaient évidentes. Un nourrisson, un bébé, un enfant, ne peut pas être responsable de sa sécurité, il est trop petit, mais tous les adultes qui l’entourent oui. Cela coule de source. Je me répète : une évidence. C’est du bon sens. De nos jours, en 2018, comment ne pas connaître toutes les préconisations liées au couchage et à la sécurité de nos tous petits ? Comment passer à côté de cela ? Cela me paraît fou. Et pourtant. Certes, il peut y avoir des facteurs de prédispositions mais ces facteurs ne peuvent être mis en évidence que si le facteur déclencheur est actionné. En gros, dans le doute, on ne joue pas avec le feu, on ne grille pas un feu rouge, on ne s’expose pas aux risques, on ne laisse pas un bébé sans surveillance, on ne laisse pas un bébé sur le ventre. Surtout pas après manger, surtout pas sur un tapis d’éveil. Et surtout pas quand on n’est pas le parent de l’enfant. Toute autre personne doit respecter les consignes des parents, qui s’additionnent à celles des organismes de santé. Donc non, cela n’aurait pas pu arriver à n’importe qui. Car on ne faisait pas n’importe quoi avec notre fils. Léo était en totale sécurité avec nous, parents, familles et proches. Si ça avait été le cas, cela aurait été un accident car toutes règles de sécurité autour et sur lui auraient été respectées. Si ça avait été le cas, le cœur de Léo se serait arrêté de battre en premier or c’est sa respiration qui s’est arrêtée, obstruée, gênée. Cela veut donc tout dire.
A qui confions-nous la garde de nos enfants ? Qui sont ces personnes ? Comment sont-elles formées, évaluées, encadrées, contrôlées et suivies ?
Nous ne sommes pas des parents qui cherchent à tout prix un responsable sur qui déverser pleurs, tristesse et énervement. Nous avons toujours souhaité être en paix dans notre bouleversante histoire mais malheureusement le responsable présumé a très rapidement été pointé du doigt et en l’occurrence pas par le nôtre en premier lieu. Cela en dit long. Nous sommes des parents qui veulent des réponses et faire en sorte que jamais d’autres parents ressentent ce qui nous habitera pour toujours.
Voici notre combat qui fait partie intégrante de notre quotidien. Car nous sommes des parents pour la vie et notre rôle de parents ne s’arrêtera pas au 26 mars, il ne s’arrêtera jamais.
Notre petit guide Léo nous éclaire vers l’avant et vers l’avenir.
« Léo ne s’est pas envolé pour rien ».
Léo pour tous, tous pour Léo.
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Quel émouvant témoignage… Bravo pour tout ce que vous faites avec tant de courage pour Léo et tous les autres bébés. Ne pas sombrer dans la colère doit être un défi quotidien, je suis profondément admirative de votre force, votre courage, votre amour. Je pense à vous souvent, je vous embrasse
Un grand merci Séverine pour tes mots et ton soutien précieux. Bisous !