La Maison du Bonheur
17 déc
Chaque drame fige notre vie et notre cœur. Nous plongeons dans un état de sidération totale et d’hypnose douloureuse. Le temps a fait un arrêt sur image pour rendre les choses encore plus insupportables qu’elles ne le sont. On assiste littéralement à sa vie comme un mauvais spectateur. Puis on reprend ses esprits et on se rend compte que cette vie-là, c’est la nôtre. Tout est surréaliste mais malheureusement bien réel. Je me souviens de chaque millième de seconde du 26 mars. J’ai réalisé avec le temps, que je ne portais plus aucun des vêtements que j’avais mis cette journée. J’ai même jeté les chaussures. Chaussures avec lesquelles je n’arrivais pas à courir vers mon abominable destin.
Acte manqué.
Perdre Léo est un traumatisme pour le cœur, le corps, l’esprit et la mémoire. Des images, des sons, des lieux qu’on n’oubliera jamais. Des détails dont on ne parlera pas beaucoup, par pudeur et par peur de choquer. La triste ironie de notre vie, le paradoxe de notre drame ; nous sommes des victimes de la vie mais nous ne voulons pas faire de victime de notre récit. En état de choc, nous avons peur de choquer.
Reprendre ses esprits, c’est gérer l’après. Si tant est que cela soit possible d’avoir une vie après le décès de son enfant. A court terme, on a souhaité voyager par-ci, par-là, seuls ou accompagnés. A moyen terme, déménager. Et à long terme, vivre. Nous avons signé l’acte de vente le jour de la sortie du premier article pour Léo (Le Parisien) et quand nous sommes arrivés dans notre maison, plusieurs petites coccinelles se baladaient sur les murs. Il est prévenant notre Fils, il nous envoie encore et toujours des signes de sa présence éternelle, de son légendaire soutien et de sa touchante bienveillance.
Une grande étape de l’après drame, c’est donc de vivre dans une maison, après notre appartement, avec un grand jardin après notre balconnet. Une douce et chaleureuse maison en campagne où tout a été fait avec soin et amour, des travaux à la décoration. Un cocon de douceur et un havre de paix pour parents en convalescence lourde. Parents qui ont besoin de vivre autrement. Ailleurs. Un lieu à nous, le « nous » incluant Léo, où règnent joie et bonheur. Un lieu où l’on se sent aussi bien pour rire que pour pleurer.
Notre chez nous.
Nous y avons d’ailleurs accueilli une petite boule de poils il y a quelques jours. Nous avons demandé à Léo s’il nous suivait dans ce délicieux caprice et tous les moulins à vent du Petit Jardin ont tourné dans une gracieuse synchronisation. Léo nous suit toujours dans tous nos choix, même les plus fous. Même à poils longs.
Léo a sa place partout dans cette maison, il a pris ses marques aussi à sa manière. Nous n’avons plus la chambre de Léo mais nous avons la chambre avec les affaires de Léo. Des petits clins d’œil sont glissés dans notre décoration. Je me souviens lors de notre déménagement, Charles m’avait demandé « si j’avais bien pris les rideaux de son Bébé ? ». Nous ne sommes pas dans le déni, nous sommes totalement conscients de ce qu’il se passe mais nous arrivons à inclure Léo dans notre quotidien. Léo vit avec nous et donc partant de cela, Léo a déménagé avec nous.
Cette maison, c’est notre premier pas vers un avenir heureux. Un premier pas sans Léo dans nos bras mais encore plus présent dans notre Cœur.
“Je porte ton cœur dans mon cœur. Je ne suis jamais sans lui et partout où je vais, tu vas. Et c’est ça le miracle qui fait briller les étoiles de mon ciel » (E.E. Cummings).
La Maison du Bonheur, la Famille du Bonheur.
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