Les rayures

22 juil

Mon Petit Marin,

Les rayures sont, de nos jours, le symbole de la liberté, liberté que tu vis dans ton monde infini de nuages, aussi moelleux que du coton et d’étoiles, aussi brillantes que tes jolis yeux. Ce motif me fait, justement, penser à l’infini avec ces traits qui n’auraient presqu’aucune limite. J’assimilerai toujours les rayures à ta petite personne. Il est vrai que nombreuses de tes affaires en contenaient. Cela t’allait si bien, comme tout d’ailleurs. Forcément.

Les rayures me rappellent ce moment où tu avais quelques jours à peine. On choisissait les photos pour réaliser le faire-part de ta naissance. Tu posais dans les bras protecteurs de ton Papa vêtu de ce body qu’il t’avait acheté dans une célèbre enseigne. Il était revenu un soir, lorsque j’étais enceinte, avec plusieurs tenues complètes en taille 1 mois. Il était si fier de t’avoir choisi ces jolies pièces. Un mélange de rayures, de toutes petites étoiles et de col claudine. Je les avais d’ailleurs choisies pour ta valise de maternité.

Les rayures me rappellent également ce gilet à capuche que mes parents t’avaient offert. Il était un peu grand pour toi alors on te retroussait les manches. On te mettait la capuche et on riait en t’imaginant faire du rap, la petite pointe tendue sur la tête. Je me remémore d’ailleurs très bien une série de photos et vidéos où tu ris, les larmes aux yeux, avec la capuche qui t’arrive au milieu du front. Tu mettais même tes petites mains devant ta bouche d’un air espiègle et malicieux. On peut apercevoir ce gilet sur ce qui sert de logo à ton Etoile Léo.

Les rayures me rappellent aussi ce pull marin, avec un cœur rouge sur le devant et trois petits boutons sur une épaule, que tu avais repeint avec de la purée de carottes. Mais quelle idée Maman de mettre un si joli pull pour une manœuvre aussi technique ?

Les rayures me rappellent, de plus, ce petit gilet tout chaud sans manche qu’on te mettait le soir, après le bain, par-dessus ton pyjama. L’intérieur était aussi doux qu’une de tes peluches. Il te donnait un air de premier de la classe. Comme le disait nos amis, un futur président. La cerise sur le gâteau du style vestimentaire était quand on l’associait avec le pyjama de ton cousin comportant une ancre marine.

Les rayures me rappellent tellement mon body préféré, je suis certaine que tu te souviens du rayé bleu et blanc avec les bords rouges. Je l’avais acheté en taille 1 mois et Mamours en un peu plus grand. Je me souviens l’avoir regardé pendant de longues minutes dans la voiture en me disant «mon Bébé va rentrer là-dedans ». Le motif se tendait légèrement quand ton petit ventre était bien rempli. On te le mettait souvent avec un jean assez large et une casquette avec l’inscription « New-York ». Un vrai p’tit mec !

Les rayures me rappellent malheureusement celles que tu portais le jour où tu nous as quittés ainsi que celles qui me donnaient si froid, ayant dû partir précipitamment du travail et donc sans manteau, ce même jour. Mais la vie l’emporte toujours sur la mort, preuve en est, je me suis séparée de tout ce que je portais le jour de ton décès sauf de ma marinière.

Tellement de souvenirs, majoritairement heureux, me bercent, m’apaisent. Certains autres, plus durs reviennent de manière brutale, mais il est vrai que sur beaucoup d’entre eux tu portes des rayures. C’est ton motif. Ce qui est fou, c’est que notre univers de prédilection porte sur ce qu’il y a au-dessus de nos têtes et non au niveau des flots. Peut-être que notre tragique destinée nous a laissé les étoiles pour ta vie de l’au-delà, pour pouvoir assimiler chacun des motifs à chacune des périodes de ta vie, de notre vie. Avec Léo, sans Léo. Peut-être que ce mécanisme nous aide à ne pas plonger notre cerveau dans un monde confus où l’on mélangerait véritables souvenirs de moments partagés ensemble et moments rêvés et imaginés, où l’on mélangerait les rayures et les étoiles, la vie et la mort.

Marin stylé d’une vie, Astronaute étoilé d’une autre.

Article Les Rayures 2

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Photo Charles Pestana.

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