Le post-partum d’après

27 fév

Je n’avais, jusque là, pas souhaité mélanger ma vie professionnelle et ma vie personnelle. J’ai toujours eu à cœur de séparer les deux. Cela était du bon sens pour moi et je l’avais même appris en formation ; « toujours revenir aux parents (clients) même s’ils questionnent à propos de notre propre vie ».

Aujourd’hui, sans élément particulier et en même temps j’en ai une multitude en tête, les deux se rejoignent. Cela relevait de l’utopie d’imaginer cloisonner chacune de ces deux vies quand elles ont ce précieux point commun qu’est la maternité.

Quand j’ai décidé de devenir accompagnante périnatale, c’était un choix qui émanait de mes propres expériences de grossesse et de maternité. J’ai découvert un univers absolument fascinant. J’ai eu cette soif d’apprendre encore et encore sur des sujets qui m’apparaissaient de plus en plus familiers ; porter la vie, la donner et devenir parent(s). J’allais vite apprendre, par moi-même et grâce aux nombreuses lectures et recherches que j’avais pu faire. C’est bien la maternité et la parentalité qui m’ont donné envie, après plus de huit années dans l’industrie du textile, de me consacrer au monde périnatal. C’est malheureusement le deuil de mon Léo qui m’a donné l’impulsion pour vraiment me lancer. Il avait raison mon fils, après tout on a qu’une seule vie.

J’ai souhaité me dédier au post-partum quand j’ai réalisé à quel point cette période était sous-estimée, minimisée voire carrément tue (je vous conseille vivement la lecture du puissant « Ceci est notre post-partum » d’Illana Weizman).

Après mon premier accouchement, je le reconnais, j’ai eu un post-partum de rêve ; physiquement et psychologiquement, tout est très rapidement rentré dans l’ordre. Le lendemain de la naissance de mon premier enfant, j’avais vraiment l’impression de reprendre ma vie d’avant grossesse avec un bébé en plus.

Et puis Léo nous a quittés.

Par conséquence, dans mon esprit ; l’après, le post-partum, la vie de maman, de parents, physique avec son enfant, la fatigue, l’épuisement, l’éducation, la parentalité… tout cela ne durait que quatre mois et treize jours. Je n’avais aucune idée de ce qu’il y avait ensuite, pour moi cela n’existait même pas/plus. Alors je vous laisse imaginer cette terrible dualité des sentiments et cette appréhension quasi permanente depuis que Lohan est arrivé dans nos vies et dans nos bras.

Au-delà de toutes réjouissances physiques qu’énumère très bien Illana Weizman, j’ai découvert le poids du psychique ; celui de tout parent mais aussi celui de parent endeuillé. La fatigue, la fragile patience, la culpabilité, les angoisses, la frustration, les larmes. Pourtant, j’ai la chance d’avoir un bébé gentil avec qui la vie est franchement facile mais cela n’est effectivement pas incompatible avec tous les états listés plus haut et dont la liste est non exhaustive.

On connait, pour sûr, le début du post-partum mais la date de fin est quant à elle inconnue et dépend de chaque accouchement, de chaque femme, de chaque histoire. Pour ma part, je ne sais pas si cela sera la fin mais le cap des trois ans du décès de Léo me semble cette année presque insurmontable.

Dans ces (rares) moments plus durs, être avec Lohan me montre ce que je n’aurais jamais avec Léo et ce que j’ai, encore, terriblement peur de perdre. Dans ces moments plus durs, la fatigue, la fragile patience, la culpabilité, les angoisses, la frustration, les larmes prennent le dessus sur la délicieuse et presque insouciante vie auprès de mon cadet. Dans ces moments plus durs, chacune des émotions et chacun des symptômes du post-partum me semble comme une périlleuse montagne qu’il m’est impossible de franchir. Je finis toujours par y arriver, fort heureusement, car j’ai la chance de bien être entourée avec en première ligne un mari/papa parfait.

Dans ces moments plus durs, Léo me manque à en perdre la raison et j’ai l’impression de faillir à mon rôle de maman avec Lohan. Je suis fatiguée, je perds patience, la culpabilité me ronge pour l’un comme pour l’autre, mes angoisses sont décuplées, je suis frustrée de ne pas trouver plus de temps pour Léo et je pleure. Beaucoup.

Le mouvement initié par Illana Weizman pour briser le tabou concernant le post-partum a été suivi par celui du post-partum après un deuil périnatal car les femmes concernées en vivent également un. Il est primordial de le dire. Dans cette nécessaire continuité de libération de parole, je souhaitais donc parler de mon post-partum du bébé d’après celui décédé et j’ai à cœur en tant que professionnelle d’accompagner, aussi, ces parcours bien trop abîmés de vie.

Il est vrai qu’on attend toujours d’une jeune maman (et d’un jeune papa) un sourire permanent et un bonheur éclatant. Je l’ai moi-même pensé, pendant ma période PMA, je l’ai moi-même vécu pendant la vie éphémère de Léo. Mais c’est justement parce qu’être parent c’est pour toujours que l’on doit aussi dire et entendre quand ce n’est pas simple car ces moments plus durs ne diminuent en rien l’amour porté à nos enfants.

Photo article Le post-partum d'après

Copyright (c) 2021 L’Etoile Léo. Tous droits réservés.

Site professionnel : Julie Pestanartero.

Pas encore de commentaire

Laisser une réponse

Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus