Du sens à l’insensé
23 sept
Mon Léo,
Me revoilà presqu’un an plus tard.
Quand le projet de reconversion professionnelle est apparu comme une évidence, j’ai vite réalisé que le mettre en pratique le serait beaucoup moins. Je craignais tellement de ne pas être prise au concours que je ne voyais pas au-delà. Et puis j’ai vu mon nom sur la liste des admissions. Là ce n’était plus le concours que je craignais de ne pas avoir mais mon diplôme ; l’intensité des cours (dont deux semaines sur l’anatomie du corps humain !), 11 évaluations (un résultat en dessous de la moyenne amène aux rattrapages), 4 stages dont un de sept semaines…
Le jour de la rentrée, on a nous annoncé la couleur « vous allez pouvoir acheter des conserves et des pâtes, vous n’aurez pas le temps de cuisiner ». Pas faux. J’en ai mangé des pâtes, et ton frère et ton père tout autant. Mais cela valait tellement le coup.
J’ai tellement appris sur moi, sur mes capacités, sur mes limites, mais aussi et surtout sur ce métier, ce si beau métier. Et tu étais partout mon Léo, comme toujours.
Tu étais là quand j’ai pris la parole pour la première fois devant l’amphithéâtre, tu me donnais ton courage. Tu étais là quand je me suis présentée à toute ma classe et que j’ai expliqué être une maman pas comme les autres. Tu étais là quand j’ai eu le cours sur la mort inattendue du nourrisson et que je suis sortie en pleurant de la salle quand on a commencé à parler d’autopsie. Tu étais là quand je me suis portée volontaire pour faire la simulation de réanimation d’un enfant. Tu étais là quand j’ai donné le bain à mon tout premier nouveau-né en maternité. Tu étais là pour me secouer quand je pensais ne plus y arriver. Et tu seras là, fier je l’espère, le jour de ma remise de diplôme.
Ce métier a tant de sens, j’y ai trouvé ma place mais surtout j’ai pu t’en faire une également. Il n’y aura jamais aucun sens donné à ta perte mais j’avais besoin, pour le reste de ma vie, de ma carrière notamment, d’en avoir dans mon quotidien sans toi. M’occuper des bébés, des enfants, de leurs parents, peu importe le milieu ou la structure, cela me porte tant. C’est un métier dont je suis extrêmement fière, une vocation, une passion, que je n’aurais jamais eu le courage de faire sans toi. Sans vous.
Alors merci mon Léo, merci de m’avoir encore une fois montré le chemin. Merci d’avoir cru en moi. Merci d’être toujours là. Tu as ce pouvoir magique d’être présent, à ta manière, et de me faire presque oublier, l’espace de quelques secondes, ta terrible absence. J’ai l’impression que les planètes sont enfin alignées, comme s’il y avait enfin un peu de sens à cette vie insensée sans toi.
Nous t’aimons autant que tu nous manques et tu nous manques autant que nous t’aimons.
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